LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

 

LETTRE OUVERTE

AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,

AU PREMIER MINISTRE,

AU MINISTRE DE LA SANTE

 

La réanimation enfants de l'Hôpital de la Timone à Marseille manque de lits. A cause de cela, des enfants qui doivent être opérés ne le sont pas. Les chirurgiens malgré leur bonne volonté, leur compétences indiscutables ne peuvent plus travailler dans de telles conditions.

 

Les familles sont convoquées pour faire opérer leur enfant, puis se voient renvoyées à la maison car il n'y a pas de place pour lui en réanimation.

 

Tous les enfants du Sud de la France sont concernés car la Timone est le seul centre capable de pratiquer certaines opérations complexes notamment en matière de chirurgie cardiaque chez les enfants et les bébés de moins de 6 mois.

 

Les enfants atteints de cardiopathies congénitales sévères, notamment, doivent attendre des mois entiers avant qu'une autre date ne leur soit proposée (si par chance il n'y a pas une autre annulation), pendant ce temps leur coeur fonctionne comme il le peut...

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Aujourd'hui, le collectif UNE REA POUR LES PETITS COEURS créé par un regroupement de familles d'enfants cardiaques s'adresse à vous afin que des solutions soient apportées d'urgence en matière de réanimation pédiatrique à l'hôpital de la Timone .

 

Des familles ainsi que la Défenseure des Enfants ont déjà maintes fois demandé des explications à l'administration de l'hôpital, parfois même au Ministère de la Santé au sujet des annulations d'interventions notamment chez les petits cardiaques... Aucune réponse ne leur a été apportée...

 

Aussi pour faire entendre la voix des familles d'enfants malades, nous avons décidé de nous regrouper.

 

Le 1er avril 2011, à Marseille, une délégation de parents a été reçue par Monsieur Bubien, Conseiller du Ministre de la Santé, et nous avons pu lui faire part de cette situation dramatique. Pour le moment, nous ignorons si des améliorations sont prévues prochainement... Il semblerait que non...

 

A ce jour, seuls 12 lits de réanimation sont destinés à accueillir les enfants de tout le sud de la France. On croit rêver devant de tels chiffres... Pourtant, c'est la triste réalité de la Timone, hôpital reconnu par ailleurs, pour la qualité indiscutable des soignants qui ont le courage de continuer leur activité dans de telles circonstances. Mais jusqu'à quand supporteront-ils de travailler quotidiennement dans la désorganisation et l'urgence, sans qu'aucune programmation ne soit possible tant la situation est gravissime ?

 

Depuis plusieurs années, la réanimation pédiatrique de l'hôpital connaît des dysfonctionnements énormes directement liés à ce manque de lits, et pire à la réduction du nombre des lits de réanimation alors que, paradoxalement, chaque année, les interventions de chirurgie cardio-pédiatriques augmentent régulièrement de 5%. Là aussi, on croit rêver... Comment expliquez-vous que le nombre de lits attribués aux enfants soit à la baisse alors que l'inverse serait une absolue nécessité ? Il y a là une incohérence qui dépasse l'entendement voire une négligence de la part de la Direction de la Timone informée régulièrement de ces problèmes de reports opératoires.

 

Ces dysfonctionnements liés à un manque évident de moyens ont par ailleurs été maintes fois dénoncés par les médecins et chirurgiens, et notamment par le service de Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire du Professeur Kreitmann. Mais visiblement rien n'a changé ces dernières années, bien au contraire, il semble que la situation se soit considérablement dégradée...

 

Le principal problème découlant de cette situation se manifeste par l’annulation dinterventions chirurgicales programmées pourtant plusieurs mois à l'avance ; cela concerne jusqu'à 40 % d'entre elles. Ces annulations touchent de plein fouet les enfants porteurs de cardiopathies qui, à ce jour, ne sont plus opérés lorsque leur coeur en a besoin, mais lorsqu'on peut les accueillir en réanimation... Cela semble tout à fait incohérent et dangereux pour la santé des enfants.

 

 

 

Ainsi, nous estimons qu'il y a actuellement une réelle situation de “non assistance à enfants en danger” faute de lits en assez grand nombre dans cette structure hospitalière qui n'est plus en mesure d'assurer les opérations chirurgicales au moment voulu. Nous estimons aussi que le droit des enfants cardiaques d'être soignés est bafoué...

 

Nous sommes accablés devant toute la souffrance des enfants et des familles face à ces annulations faites à la dernière minute (la veille voire le jour de l'opération), parfois même alors que l'enfant est drogué pour la dite intervention et ressorti du bloc aussitôt faute de place pour lui en réanimation. Les témoignages que nous avons pu recueillir sont accablants, il en ressort principalement les points suivants...

 

Du point de vue psychologique, d'abord, il faut noter que les interventions sont programmées depuis plusieurs mois, les familles et les enfants devant être opérés se sont donc préparés psychologiquement depuis longtemps à cette épreuve. Des histoires ont été racontées aux petits pour dédramatiser l'intervention... Les parents ont tenté de rassurer leur enfant malade mais aussi les frères et soeurs à qui la séparation s'impose...

Les enfants ont informé leurs camarades d'école et leurs enseignants de leur absence, leurs amis, leurs proches... Ils ont parfois reçu des cadeaux pour l'hôpital... Les bagages ont été préparés... Les examens préalables à l'opération ont été réalisés, parfois pour rien puisqu‘ils devront être réalisés à nouveau (ce qui n’arrange en rien le déficit de la Sécurité Sociale)...

 

Le stress de la chirurgie et les risques que cela comporte commencent insidieusement à angoisser les proches... Dans cette atmosphère relativement lourde, où l'on tente de vivre comme d'habitude, la nouvelle de l'annulation, tardive ou non, sans date de report, tombe de façon bouleversante sur la famille et sur l'enfant lui-même... L'opération tant attendue n'aura pas lieu et les médecins sont incapables, malheureusement, de proposer une autre date avant plusieurs semaines... L'angoisse se répercute inévitablement dans la majorité des cas sur le jeune patient qui parfois ne dort plus, se renferme sur lui-même, la peur au ventre... Les parents sont inquiets pour l'état de santé de leur enfant qui risque de se dégrader, et les membres de la fratrie craignent parfois que leur frère ou leur soeur meure du fait de cette annulation...

 

La sérénité familiale est impossible à trouver dans une situation pareille... Le pire étant que certains enfants cumulent les annulations , et que parfois, ayant perdu toute confiance en la médecine, ils refusent d'être opérés... D'autre fois, ce sont les parents qui refusent l'intervention chirurgicale...

 

Il faut savoir que la période d’attente entre deux dates a des répercussions telles que des enfants et des parents sont obligés de suivre des thérapies pour les aider à surmonter l’angoisse, des parents prennent des traitements pour  lutter contre la dépression, parfois ce sont les enfants malades qui nécessitent la prise de médicaments contre la dépression et cela est purement dramatique...

 

Sans oublier les répercussions sur la scolarité des enfants qui restent à la maison la semaine précédent l’intervention : pour limiter les risques de contaminations de type grippe etc... pour qu'ils puissent également subir les examens préalables à l’hôpital...

L’annulation ayant lieu, les enfants doivent réintégrer leur classe, expliquer à leurs camarades que leur coeur n’a pas été réparé et qu’ils attendent une nouvelle date... Lorsque les annulations se succèdent, la scolarité peut être tout à fait mise à mal , menant parfois à des redoublements... Autant de soucis supplémentaires dont les enfants malades se passeraient volontiers...

 

 

Du point de vue matériel, l’hospitalisation d’un enfant engendre évidemment toute une réorganisation de la vie familiale (la prise de congés pour les parents, la garde des autres enfants de la fratrie, la recherche d‘un lieu pour vivre à Marseille.... ). Les remplacements sont prévus... Puis l’annulation de l’opération a lieu obligeant les parents à reprendre leur travail au pied levé... Plus tard, lorsqu’une nouvelle date est proposée par le médecin, les parents doivent réitérer leur demande de congés.... Certaines familles ont vécu 5 reports... Imaginez donc la situation vis à vis de l’employeur qui parfois n‘est plus aussi compréhensif que la première fois... Des parents ont été licenciés à la suite de plusieurs demandes de congés consécutives car l‘absence du salarié perturbait le fonctionnement de l‘entreprise...

 

D’autre part, les enfants traités à la Timone viennent de toute la région Sud mais aussi de la Corse voire de l’étranger, ce qui engage des frais considérables de transport outre l’hébergement sur place. Nous avons des témoignages terribles de familles de Corse qui ont du vivre plusieurs mois à Marseille pour rien car aucune date n’a pu leur être proposée... Ces situations sont tout à fait inacceptables...

 

 

Du point de vue médical, l'insuffisance de lits de réanimation concernent tous les enfants du sud de la France. Elle prive temporairement les enfants atteints de cardiopathies d'actes chirurgicaux pourtant vitaux pour eux... Une nouvelle date ne peut être proposée que plusieurs mois plus tard, ce qui augmente inévitablement les risques de dégradation de l'état de santé du patient. Comment pourrait-on nous faire croire le contraire alors qu’un coeur malade fonctionne mal en attendant d‘être soigné ?

 

 

 

Dans certains cas, les échographies antérieures ne correspondent pas à ce que les chirurgiens trouvent lors de l'intervention tant les délais ont été repoussés... Jusqu’à quand va t-on laisser se dégrader l’état de nos enfants ? Faudra t-il attendre la mort de l’un d’entre eux pour que le Ministère prenne ses responsabilités ou qu’un scandale comme celui du sang contaminé n‘éclate ?

 

Sans oublier que cette insuffisance de lits met en danger les autres enfants (accidents de la circulation, ou autres...). Le fait que la réanimation de la Timone soit générale implique qu'elle soit rapidement saturée compte-tenu du secteur géographique qu'elle recouvre.

 

 

Nous nous demandons, par conséquent, quand la direction de la Timone compte ouvrir une réanimation spécifique à la cardiochirurgie pédiatrique, ce qui représente environ 500 enfants par an. Faut-il continuer à reporter les opérations du coeur complexes parce que les accidentés de la route ou autres entrent en urgence dans le service ? La création d'une réanimation spécifique permettrait sans aucun doute de désengorger la réanimation générale et permettrait aux équipes médicales de fonctionner enfin dans des conditions optimales de sécurité... Tout cela nous semble assez logique, alors qu'attend t-on pour travailler en ce sens ?

 

D'autre part, la désorganisation connue par les soignants du fait du manque de moyens, et il s'agit là d'un point particulièrement important, accroît incontournablement les risques en matière de sécurité et de qualité des soins.

Si davantage de lits, d'infirmières de réanimation et de matériels étaient destinés aux équipes, le turn-over serait sûrement moins important et les soins dispensés n'en seraient que meilleurs, les risques d'erreur seraient moindres... Les chirurgiens qui exercent un métier risqué ne savent pas le matin même s'ils pourront opérer ou pas, tout est préparé à la dernière minute... Ils doivent à présent se confronter aux familles en désarroi et leur annoncer la nouvelle de l’annulation. La gestion du stress des familles et des enfants est déjà bien complexe en temps normal. Les annulations en ajoutent encore davantage... Cela nous semble tout à fait inacceptable alors qu'il s'agit de sauver des vies d’enfants...

 

Autre point sensible...Le traitement de la douleur des jeunes patients est, nous le savons bien, différent que l'enfant soit pris en charge en réanimation ou qu'il soit en chambre. Aussi, nous estimons que les enfants cardiaques, notamment, sortent trop vite de réanimation (parfois moins de 36 heures après une intervention à coeur ouvert très lourde) ce qui entraîne des souffrances atroces que l'enfant ne connaîtrait sans doute pas s'il était en réanimation. Des enfants installés en chambre préfèreraient mourir et le verbalisent lorsqu'ils sont assez grands tant leurs souffrances sont épouvantables, malgré les traitements dispensés pas les équipes spécialisées pourtant formidables...

 

Cela ne peut nous laisser insensibles et sourds, il faut donc impérativement prolonger la durée de séjour des jeunes patients en réanimation pour les préserver. Cela ne se fera que si le nombre de lits augmente, il n'y a pas de mystère... L'insuffisance de lits explique t-elle qu'à la Timone le temps moyen passé en réanimation soit de 4 jours de moins que dans les autres hôpitaux français ? Comment est-ce possible que d'une région à l'autre les différences de traitement soient telles ?

 

En conclusion, le collectif UNE REA POUR LES PETITS COEURS exige que la situation soit expressement étudiée afin que les familles et les jeunes patients cessent d'endurer les conséquences d'une gestion hospitalière défaillante qui ne permet pas d'opérer les enfants à temps.

 

Les fonds versés pas la Sécurité Sociale sont-ils intégralement utilisés en direction des enfants malades ?

 

Bien sûr on aurait pu imaginer que la nouvelle aile de la Timone prévue pour 2014 (initialement prévue pour 2013), aurait pu palier à ce manque de lits puisqu’il est prévu d‘y créer une unité de surveillance intensive qui désengorgerait la réanimation générale, mais cela sera bien insuffisant pour combler la réduction du nombre de lits qui est constante depuis des années...

De plus, 75 % des enfants opérés du coeur ont moins de 6 mois, ils ne pourront donc pas attendre 2014... Sans oublier que des fermetures de lits en pédiatrie sont programmées à l’Hôpital Nord ce qui surchargera encore plus la Timone...

 

 

Il faut donc agir maintenant pour qu'une dizaine de lits soit accessible au service de chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire pédiatrique dans les plus brefs délais et mettre fin, ainsi, à cette situation dramatique.

 

Le collectif demande que les moyens indispensables aux chirurgiens et autres soignants leur soient affectés le plus rapidement possible. Nous savons que des solutions existent d'ores et déjà au sein de la Timone et qu'il suffirait de les mettre en place immédiatement pour diminuer considérablement le nombre de ces annulations à court terme.

 

 

Comment se fait-il que rien n'ait été envisagé après des années de mise en péril des soins destinés aux jeunes patients, notamment aux petits cardiaques ? Va t-on attendre encore longtemps que des accidents surviennent pour qu'enfin apparaisse une véritable prise de conscience des risques encourus par les enfants en attente d’opération ?

 

Nous vous demandons d'intervenir auprès de L'Agence Régionale de la Santé de Marseille et de la Direction de la Timone pour que les équipes médicales qui font partie des meilleures au monde soient enfin entendues. Il n'est pas normal que des patients soient obligés de monter dans la région parisienne pour être opérés, il n'est pas normal que des centaines de familles soient renvoyées chez elles alors qu'une intervention a été prévue depuis des mois...

 

Les enfants malades et en particulier les petits cardiaques ont le droit au respect et ils ont également le droit d'être soignés, cela fait partie des droits de l'enfant... Or, pour le moment ce droit au soin est plus que malmené.

 

Vous aiderez-nous dans cette action pour le respect des droits des enfants malades ?

 

 

 Châteauneuf de Gadagne le 19 juin 2011,

 

LE COLLECTIF

UNE REA POUR LES PETITS COEURS

 

 

 

 

Pour plus d’information sur notre collectif :

 

http://www.lapetition.be/en-ligne/Pour-la-creation-de-lits-a-la-reanimation-enfants-de-la-Timone-8745.html

 

http://une-rea-pour-les-petits-coeurs.over-blog.com/articles-blog.html

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